Robin GUILLOUX – Courrier Français du Berry – Abbaye de Noirlac

Olivier CLAVAUD : Les sources de la lumière
Novembre 2003

« Qui est le chercheur ? Qui est le cherché ? Le cherché est la Lumière divine, le chercheur est une parcelle de cette lumière » (Najmaddîn Kobra).

L’ancien dortoir des frères convers de l’abbaye de Noirlac abrite, jusqu’au samedi 22 décembre, sous la carène inversée de sa robuste charpente de châtaignier, une trentaine d’œuvres d’Olivier CLAVAUD.

Ces créations, escales enchantées d’un voyage initiatique, portent des noms étranges : « Manfalgar », « Boutan », « Zanzibar », « Siddarta Gantana », « Black Japon », « Tibet », « Peuls », « Sikkim », « Moulins à prières », « Kakemono », « Torah », « Totem »…

Elles évoquent aussi bien la sagesse sereine du bouddhisme que les cérémonies des bois sacrés d’Afrique noire, la philocalie orthodoxe que les mystères talmudiques ou les extases des soufis.

L’artiste sait que toutes les croyances ne disent pas exactement la même chose ; il ne méconnaît pas les différences… Il a choisi de travailler sur un thème qui hante la plupart des traditions, voire toutes : celui de la lumière.

Toute œuvre bien ajustée naît d’une contrainte féconde : conçue à l’origine pour l’église abbatiale, la série prévue n’a pu finalement y trouver place. Les dimensions initiales ont été réduites et sans doute est-ce bien ainsi car les œuvres actuelles s’adaptent à merveille à l’espace plus intime et plus restreint du dortoir.

Certaines créations ont la dimension de fenêtres, d’autres, faites de plusieurs toiles juxtaposées investissent l’espace somme de grandes baies ouvertes sur la splendeur.

Un art à la fois abstrait et symbolique, équilibré et jubilatoire, géométrique et minutieux, s’exprime à travers ces œuvres. « Abstraites », certes mais déroutantes, familières au contraire et même paradoxalement… « classiques ».

La lumière par les joyaux

De loin, on perçoit des espaces géométriques dépouillés, compartimentés, avec une prédilection pour les quadrilatères, rectangles et carrés sans doute régis par le nombre d’or et où dominent le rouge et l’orangé, du noir rehaussé de feuilles d’or, du bleu d’outre-mer, du vert émeraude, des traits de crayon comme tracés sur une épure par une main d’architecte : un segment, un arc de cercle…

De plus près, de mystérieuses arabesques, des détails exquis, de jubilants éclats de joyaux… topazes, agates, chrysolites, émeraudes, saphirs, lapis lazulite, ocelles iridescentes comme les ailes de ces grands papillons bleus du Brésil, plumes, précieuses incrustations de cuir, de tissu et de parchemin, tout un univers secret et profond, magique et moiré comme le cœur d’un kaléidoscope imaginaire… Travail d’orfèvre, d’enlumineur, de calligraphe, de maître verrier, « d’apprivoiseur » de lumière…

Trois cylindres de bois recouverts de signes étranges font penser à des moulins à prière ; On s’enchante à les faire tourner…

Il y a aussi des retables miniatures en forme de diptyques, ces tableaux qui se cachent et s’entrouvrent comme des fleurs rares derrière des portes précieuses et pleines d’attraits qui sont aussi des œuvres d’art…

Un vernissage en musique

Le jour du vernissage, un trio de musique yiddish, « Klezmer Fantaisie » (une guitare, un violon, une contrebasse) jouait des mélodies d’Europe centrale dont la fraîcheur joyeuse et entraînante faisait un écho sonore aux toiles qu’elles semblaient illustrer…

Nulle trace de narcissisme ou d’impudeur dans ces œuvres à la fois fortes et discrètes comme des icônes, non pas « éclairées », mais « éclairantes ». En passant devant un beau chandelier à trois branches qui brûlait parmi elles, on se dit qu’elles brûlaient un peu de cette manière-là.

Tandis que dogmes et religions séparent leurs adeptes et les dressent parfois les uns contre les autres, l’art, lorsqu’il exprime, comme le fait Olivier CLAVAUD, l’essence du sentiment religieux authentique, celui de la  présence discrète et bienfaisante de l’amour et de la beauté, ne peut que rassembler les hommes de bonne volonté.

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